Ami lecteur, tu te demandes sans doute quel est donc l’ingrédient principal de cette recette dont au sujet de laquelle je m’en vais t’entretenir. Ce nom de pomme folle vient de sa mauvaise réputation qui, bien qu’inexpliquée, lui valait le surnom de mala insana ; ce qui signifie sans doute pomme mauvaise mais j’ai préféré traduire plus approximativement par pomme folle. Ce fruit, que nous prenons tous pour un légume alors qu’il fait partie de la même famille que les tomates, a émigré depuis l’Inde et la Birmanie en passant par la Turquie et les Balkans. Un peu comme les Roms, donc, et poursuivi du même type de réputation sulfureuse. C’est pourquoi si je devais illustrer musicalement cette recette, ce serait ainsi :
Si je te dis que ce légume fruit peut être appelé aussi mélongène, et si j’ajoute qu’il est le plus souvent de couleur violette, tu auras sans doute compris qu’il s’agit de l’aubergine. Les façons de l’accommoder ne manquent pas, mais la recette que je te propose, si elle n’est pas vraiment une invention, est tout de même une adaptation basée sur la caviar d’aubergines en vu d’essayer de s’approcher d’un plat goûté en Ardèche par une chaude nuit d’été.
Il te faudra te munir de quatre aubergines dont tu trancheras l’extrémité qui porte le pédoncule. D’une lame acérée, tu pratiqueras quatre fentes dans la longueur tout autour de chaque fruit. Tu les disposeras sur une plaque recouverte de papier aluminium et tu les badigeonneras d’huile d’olive. Tu les enfourneras ensuite pour les laisser cuire trois quart d’heure à 180°C (thermostat 6). Afin de ne point te brûler, tu les laisseras refroidir. Je te laisse le choix d’occuper ce moment comme bon te semble. Puis, lorsque l’épiderme de tes paumes sera en mesure de s’accommoder du contact des aubergines, tu les éplucheras et te réjouiras de la facilité de l’opération. Après les avoir grossièrement coupées au couteau, tu leur feras subir la lame de ta demi-lune. L’intérêt de l’opération est de conserver les fibres naturelles dont le fruit est fort riche, tout en la hachant assez menu. Tu verseras 2 cuillères à soupe d’huile d’olive dans un faitout et tu y feras revenir à feu doux ta purée d’aubergine à laquelle tu ajouteras 70 grammes de concentré de tomate, trois cuillères à soupe de coriandre hachée, du sel et du poivre. Deux heures de mijotage ne seront pas de trop pour obtenir un résultat satisfaisant, mais tu prendras soin de ne pas laisser attacher au fond en remuant régulièrement. De nouveau tu laisseras refroidir la compote obtenue. Ce qui te laissera largement le temps de hacher deux gousses d’ail que tu incorporeras avant de placer le résultat au réfrigérateur.
Comme le caviar d’aubergine, le plat se mange froid. Il peut être servi en apéritif, dans un bol où l’on trempe des gressins par exemple, ou bien sur des petits toasts que l’on garnira volontiers de quelques graines de sésame, mais aussi en entrée et même en accompagnement d’une viande. Il peut, si on le préfère, être réchauffé au moment du service. Cette façon de concocter l’aubergine a pour but de mettre en valeur et rehausser son arrière-goût de champignon (voisin du cèpe) et j’espère que ton palais m’en saura gré.
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